L’après Fukushima
Patrick BIANCHI, Vice-Président de notre Fédération CFTC-CMTE en charge des activités nucléaires s’est déplacé dernièrement au Japon dans le cadre de son mandat de membre permanent au bureau du Haut Comité pour la Transparence et l’Information sur la Sûreté Nucléaire (HCTISN), afin d’avoir une vision et un partage de bonne pratique suite à l’accident de la centrale nucléaire de Fukushima.
Voici une petite synthèse de ce déplacement
Le Japon est marqué par son isolement géographique qui entraîne de fortes contraintes pour son réseau électrique. 11 opérateurs nationaux se partagent le réseau japonais et leur financement est privé à l’exception désormais de TEPCO dans lequel l’État japonais est entré au capital suite à l’accident de Fukushima Daiichi. Il y avait 57 réacteurs avant l’accident de 2011 qui étaient tous en bord de mer dont 33 réacteurs ont été déclarés recevables sous réserve de mise aux normes et 24 sont déclassés ou à démanteler. 10 réacteurs ont effectivement redémarré à ce jour et la cible est de 25-27 réacteurs en 2030 pour assumer 20 à 22 % du mix électrique.
Le nucléaire est actuellement revenu en grâce dans le double contexte de l’objectif de décarbonation et de la sécurité énergétique et de l’invasion de l’Ukraine par la Russie.
Des discussions sont actuellement en cours au sein du Parlement japonais (diète) qui portent sur l’extension de la durée du fonctionnement des réacteurs (au-delà de 40 ans, 20 années supplémentaires et mise en place de visites décennales, cadre de construction de nouveaux réacteurs).
À noter des points communs entre le Japon et la France : présence d’une usine de retraitement même si elle a connu des difficultés et doit être mise aux normes, utilisation du mixage (le MOX vient de France), développement du nucléaire à peu près au même moment (fin des années 60).
À Tokyo : ministère de l’économie, du commerce et de l’industrie (METI), NRA, cabinet Office – bureau de gestion de crise nucléaire -, agence de la reconstruction.
Dans la préfecture de Fukushima : préfecture de Fukushima, Centre préfectoral de contrôle et suivi de la radioactivité pour les produits agroalimentaires.
Points marquants
En termes de contrôle de la sûreté :
Suite à l’accident de Fukushima, l’autorité de sûreté (la NRA) est passée du METI (ministère de l’économie) au MOE (ministère de l’environnement) et son indépendance a progressé. L’analyse de la situation avant 2011 a montré que « les exploitants avaient capturé l’autorité de contrôle ».
Depuis, la NRA organise toutes les semaines des conférences de presse ouvertes au public et retransmises en vidéoconférence. 24 réacteurs sont actuellement en démantèlement dû au rehaussement des exigences de sûreté d’une part et aux perspectives d’exploitation limitée à vingt ans supplémentaires au-delà de quarante ans. Sur ces 24 réacteurs,10 sont situés à Fukushima (les 6 réacteurs de Fukushima Daiichi et les 4 de Fukushima Daiini).
La NRA met actuellement un système d’inspection avec davantage de prise de recul, en partant du point de vue de la sûreté plutôt qu’un principe de check-list qui trouve ses limites. Elle est composée de 1100 employés dont 200 sont des chercheurs qui provenaient originellement du JNS et dont beaucoup travaillent sur les risques naturels.
Par rapport à la recherche et l’expertise, il est important que les chercheurs se sentent libres dans leurs recherches tout en partageant une communauté d’intérêt avec le régulateur.
Patrick BIANCHI